« L’attractivité repose sur la revitalisation des territoires » (Laurent Saint-Martin, directeur général de Business France)

ENTRETIEN EXCLUSIF - Le bilan détaillé des investissements étrangers en France, qui sera publié demain, met en lumière une montée en puissance de toutes les Régions.
Laurent Saint-Martin, Directeur Général de Business France
Laurent Saint-Martin, Directeur Général de Business France (Crédits : © LTD / THOMAS SAMSON)

Avec 1 815 décision d'investissement recensées en 2023 en France, le pays conserve la première place en matière d'attractivité en Europe. À la clé, près de 60 000 emplois créés ou maintenus d'ici à 2027. Business France, la structure fondée en 2015 pour aider les entreprises françaises à exporter et convaincre les investisseurs internationaux de s'implanter dans le pays, a accompagné 58 % de ces projets. Ils proviennent de 56 pays différents, les États-Unis, l'Allemagne et la Grande-Bretagne en tête. La décarbonation occupe une place de choix, avec 205 décisions d'investissement, dont plus de la moitié sont des créations de sites. Laurent Saint-Martin, directeur général de Business France, dévoile pour La Tribune Dimanche les résultats de ce bilan.

LA TRIBUNE DIMANCHE- Le nombre d'extensions d'investissements a dépassé le nombre de créations l'an dernier. Est-ce un motif d'inquiétude ?

LAURENT SAINT-MARTIN- Non. Elles prouvent au contraire que le pays consolide son attractivité depuis cinq ans. Les extensions industrielles sont essentielles. Sans elles, on risquerait à terme de perdre l'investissement initial. Près de 2 000 décisions d'investissements ont été recensées en 2023.

Êtes-vous satisfait de ce résultat ?

Oui, puisqu'il indique que la France tient son rang dans un contexte international très troublé. Un grand motif de satisfaction pour le gouvernement, le ministre du Commerce extérieur Franck Riester, les conseillers du commerce extérieur - et tous ceux qui travaillent à la croissance de l'attractivité nationale -, c'est que le pays conserve la confiance des investisseurs internationaux. Et la confiance est la clé des décisions d'investissements.

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Le plan américain de réduction de l'inflation, qui comprend des subventions massives pour les entreprises, a-t-il instauré une concurrence ?

Sans aucun doute. Mais le plan France 2030, doté de 54 milliards d'euros, l'avait anticipée : 559 projets sont directement liés à la mise en place de ce dispositif. Notamment en ce qui concerne la décarbonation - 11 % des projets - et l'innovation, deux domaines où la France est perçue de façon très positive à l'étranger. Plusieurs pôles d'excellence se consacrent aux technologies majeures de demain, dont l'intelligence artificielle et le quantique, comme à Paris-Saclay, à Toulouse ou à Sophia Antipolis. Sans oublier bien sûr nos secteurs emblématiques, comme l'aéronautique, l'aérospatiale ou le luxe. Tous constituent de formidables opportunités pour continuer à investir, malgré les tensions géopolitiques. Et même si, aujourd'hui, le « quoi qu'il en coûte » mis en place pendant la crise sanitaire suscite des critiques, il n'en a pas moins été la condition indispensable de l'attractivité actuelle. La compétitivité se joue entre continents. Et les États-Unis restent le premier investisseur étranger en France.

ORIENTATION DES INVESTISSEMENTS DANS LES RÉGIONS FRANÇAISES ENTRE 2014 ET 2023



MÉTHODOLOGIE - L'indice d'orientation sectorielle d'une Région est réalisé en calculant le rapport entre la part d'un secteur dans les projets régionaux et la part de ce même secteur dans les projets nationaux.
Les projets pris en compte sont ceux de la période 2014-2023. Pour un secteur et une Région donnés, un indice d'orientation supérieur à 1 signifie que ce secteur correspond à une part plus importante des projets dans cette Région qu'au niveau national. Plus cet indice est élevé, plus l'orientation de cette Région est forte. Un indice supérieur à 1,5 indique une part de ce secteur dans les investissements de la Région 50 % plus élevée que cette part au niveau national, soit le signe d'une orientation très forte de la Région concernée dans ce secteur. © LTD / Camille Chauvin

Comment se présente la répartition régionale ?

Rien ne se ferait sans les territoires et leurs forces respectives. Chaque Région a ses
priorités sectorielles, les développe et s'ouvre à d'autres investissements. En 2023, un projet sur deux - et trois sur quatre dans l'industrie - a concerné des villes de moins
de 20 000 habitants. Les trois quarts d'entre eux sont de nature industrielle. L'attractivité repose avant tout sur la revitalisation des territoires, comme le démontrent le regain industriel de Dunkerque ou celui du Grand-Est, inimaginable il y a seulement dix ans. Toutes les Régions accélèrent : la santé dans le Centre-Val de Loire, les batteries dans les Hauts-de-France, l'agriculture en Normandie, la tech en Région Paca. L'Île-de-France demeure la première, mais plus aucune Région n'est isolée. Il n'y a pas de diagonale du vide en matière d'investissements. Aux côtés des Régions, les services de l'État, dont la Banque des territoires, RTE [Réseau de transport d'électricité], France Travail ou l'Inrap [Institut national de recherches archéologiques préventives], se coordonnent pour obtenir les meilleurs résultats. L'attractivité est un engagement collectif.

1 815 décisions 
d'investissement ont été recensées en 2023 en France
1re place 
occupée par la France en matière d'attractivité en Europe
60 000 emplois seront créés ou maintenus d'ici à 2027 grâce aux investissements
étrangers

Malgré tout, les Français sont souvent perçus comme pessimistes à l'égard
de leur propre pays. Pourquoi ?

Le pays a besoin de résultats tangibles pour que cesse une certaine autodépréciation, engendrée entre autres par les fermetures d'usines qui se sont succédé pendant des
décennies. La première place européenne en matière d'investissements internationaux est le meilleur argument pour que la fierté se consolide. Nos politiques économiques fonctionnent. La cohérence et la stabilité paient. Il faut être optimiste !

La dégradation des finances publiques pourrait-elle dissuader certains investisseurs ?
La France n'a aucun mal à se financer sur les marchés. La confiance dans le pays n'est pas entamée. Sans nos efforts d'investissements dans l'industrie, nous n'aurions pas restauré l'attractivité.

La France toujours championne d'Europe

Le baromètre annuel publié cette semaine par EY (qui réalise cette étude depuis plus de vingt ans) maintient la France en tête des pays européens pour les investissements internationaux en 2024, pour la cinquième année d'affilée. Si les dirigeants de sociétés étrangères évoquent davantage des craintes liées à la sécurité ou à la dégradation du climat social depuis quelques mois, c'est le coût du travail qui représente le frein principal face à des projets d'implantation. Le nombre d'investissements dans ces derniers a diminué de 5 % en un an, mais ils fléchissent dans l'ensemble de l'Europe.

Commentaires 6
à écrit le 06/05/2024 à 6:46
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Pourquoi les investissements étrangers en France génèrent-ils moins d'emplois qu'en Allemagne ou au Royaume-Uni ? Pourquoi ces différences ?.... Pourvu que ça dure !

à écrit le 05/05/2024 à 10:20
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On pourra dire que "nos politiques économiques fonctionnent" seulement quand notre balance commerciale sera excédentaire. Il est vrai qu'il faut du temps et qu'on pourra ainsi apprecier les politiques économiques de dix ans avant mais ça sera le seul...

le 05/05/2024 à 12:51
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il y a mille raison pour frener la reprise de l'economie il y a les structures ferroviaires au declin programe par le pouvoir. refus du fret comme pour les voie navigable en autre temps ce qui se passe avec la ligne clermont paris est une preuve ...

à écrit le 05/05/2024 à 8:32
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Bonjour, La cartographie des investissements en régions présentée dans cet article semble indiquer que ce bilan national ne prend pas en compte les outremers. Est-ce exact ? Si oui, pour quelle raison selon les auteurs de l’étude ? Merci pour votre...

à écrit le 05/05/2024 à 8:29
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Elémentaire mon cher Watson ! Encore faudrait il que ceux qui s' installent le fassent dans des secteurs qui ont un certain avenir ... ce que je ne constate pas chez moi en Bourgogne-Franche-Comté , une Mega-Région d' ailleurs purement artificielle ...

le 05/05/2024 à 13:22
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Fort juste ! Et que dire de l'Aquitaine ? ou l'Occitanie ? Le "regroupement", à la "va vite" fait par FH est un non sens. En France, toute concentration n'a de résultat que de mettre en place une strate supplémentaire. Ex les communautés de communes....

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